Toutes les semaines on voit fleurir de nouveaux bars à Caen, et avec eux des positionnements plus ou moins « hype » ou purement opportunistes. Vendredi soir, direction Passage du grand Turc pour découvrir le Boumbap, un bar « audiophile » qui prend la relève de l’Hédoniste. Un bar de plus donc, avec, nous dit-on, un soin particulier apporté à la qualité du flux sonore. Bien plus qu’un argument marketing, l’affirmation se vérifie sur place avec deux belles platines vinyles qui trônent à côté du bar et une belle enceinte ( hi-fi ?) soigneusement intégrée dans son coffrage en bois. Les oiseaux de nuit venus chérir leurs petites oreilles ont migré de quelques mètres depuis Les Déserteurs, assurés, sans aucun doute, d’y trouver un cocon musical plus exigeant. Pour le reste, sans aucun doute, ce nouvel espace trouvera sa petite communauté de fidèles, entre la volière très Century 21 friendly de la rue Saint-Laurent et les ruches à trentenaires de la rue Saint-Sauveur.
Et si l’aventure était au coin de la rue ?
Pas très loin de la rue Saint-Sauveur justement, en toute discrétion, se niche une des plus anciennes de nos institutions pour noctambules caennais. À force de courir la nouveauté ( ou de pleurer la perte de nos perles locales comme L’Icône) on avait presque fini par ignorer L’Ecume des nuits qui peinait un peu à sortir de son image de solution de repli par…dépit.
Il semble pourtant bien que c’est dans ce petit bar dansant que se dessine une petite révolution silencieuse qui réaligne discrètement les planètes de la nuit caennaise. En interventions aussi minimalistes que stylées, les diablotins de la lumière de KL&D y ont porté leur petite touche élégante pour un lifting visuel du meilleur effet. On est de moins en moins dans un bar à musique et de plus en plus dans un club qui n’aurait pas à rougir d’avoir pignon sur rue à Berlin, version Prenzlauer Berg. À ce lifting visuel s’ajoute une nouvelle politique de programmation musicale qui lorgne de plus en plus vers un esprit club electro qui manque tellement à Caen depuis la fermeture du club mythique de la rue des Chanoines. La nature ayant horreur du vide, on sent que par la pression des artistes-dj locaux et peut-être surtout par une volonté de la direction L’Ecume des nuits se positionne lentement vers un esprit club ce qui mérite toute notre attention et notre soutien.
Vendredi soir, on pensait retrouver les Spicy cuts, tout auréolés de leur passage au Cargö et voilà qu’on retrouve derrière les grilles de la cabine DJ la frêle et pourtant sautillante Mokä. Qu’à cela ne tienne, j’embarque avec elle dans son univers toujours aussi vitaminé et en un claquement de doigt la salle se remplit comme par magie et me voilà plongé dans un véritable lieu consacré à la musique …pour danser ! Que demander de plus, non pas un lieu où on bouge sur un timbre poste sur un son anémique ( vous mettrez les noms que vous voudrez pour identifier ces faux espaces musicaux ) mais bel et bien un espace pour vivre et danser autour de la musique, et ça change tout.
Alors un peu comme dans ces comédies romantiques hollywoodiennes où le héros finit par comprendre que son bonheur est juste dans l’appartement d’à côté, avec cette jeune femme qu’on finissait par ne plus voir à force de la croiser dans son jogging, je me plais à croire que L’Ecume des nuits pourrait bien devenir mon Club next door à moi !