Avouons-le, l’actualité (météorologique) morose pouvait nous faire craindre une sortie venteuse et pluvieuse. Fort heureusement, vers 18h, le soleil semblait vouloir faire de cette guinguette electro mondevillaise l’ultime exemple de son triomphe estival, histoire de confirmer la nécessité absolue de cet événement de la rentrée musicale.

Depuis trois éditions, le collectif Senary se charge de marquer le coup d’envoi de la saison « electro » caennaise avec sa guinguette installée de plus en plus confortablement au fond du parc du Biez, à Mondeville. Il y a trois ans, ils ont eu le nez creux en débusquant cette petite oasis de verdure qui se découvre après un périple un peu labyrinthique. Le site est idéalement placé et pour cette troisième édition tout est là pour que flotte cet esprit nostalgique et dynamique à la fois : celui d’une guinguette 2.0 où toutes les générations peuvent se retrouver sous la bannière fédératrice d’une musique envoûtante. Le moins que l’on puisse dire est que la recette est appréciée puisque vers 18h il y a foule. Des parents, trop heureux de pouvoir conjuguer la folie libertaire de leur jeunesse et les obligations de surveillance des « gosses », des aficionados du clubbing qui se prennent un dernier shoot de musique en plein air, des petites vieilles promenant un chien asthmatique qui semble retrouver l’énergie d’un chiot fougueux. Il y a quelque chose d’absolument idyllique dans cette communauté spontanée qui a répondu à l’appel de Senary, et c’est là certainement la plus grande des réussites et la preuve, s’il en était besoin, du professionnalisme certain des organisateurs. L’accès au site est gratuit et on pardonnera donc la longue queue pour accéder au stand boisson et plus encore les prix un peu parisiens du demi de bière, puisque tout cela rentre dans la trésorerie toujours précaire d’un collectif. Pour encadrer la scène, divers barnums accueillent des boutiques et donnent à l’ensemble une incontestable dimension festivalière, mention particulière pour un stand NDK qui, en s’installant là, reconnaît implicitement le caractère désormais incontournable de la manifestation … de quoi redistribuer quelques cartes, qui sait ?

Histoire de conforter cette nouvelle position, Vélo-Sono s’est mis de la partie  et c’est un peu la grande tribu festive caennaise qui se donne rendez-vous. Les acteurs et spectateurs de la nuit caennaise semblent s’être donné le mot et marquer ainsi le début officiel de la rentrée. Il faut dire que la proposition est à la hauteur et on ne peut que reconnaître le bel aménagement de l’espace, des jeux, des chaises longues, des espaces Chill à perte de vue et, last but not least, une scène qui fait éclater une sono délicate et puissante à la fois : du vrai travail de pro !

Vers 19h, j’assiste hélas aux dernières minutes du set de Dj Ony. L’ingrat défi du warm up semble relevé avec courage et même si la piste de danse est encore un peu déserte on sent flotter dans l’air de douces vibrations.

Le prochain artiste, Gibben ( du collectif Culotté) ose un live et emballe très rapidement son petit monde avec sa proposition « culottée » qui flirte habilement avec des sonorités aussi addictives qu’audacieuses. J’avoue que Gibben n’était pas encore entré dans mon radar mais sa prestation impeccable m’oblige désormais à l’inscrire dans les personnalités musicales à suivre. L’équilibre entre les nécessaires clins d’œil rythmiques et les petites pépites mélodiques inédites est parfaitement tenu et donne à l’ensemble une rigueur formelle très classe. La scène se remplit spontanément devant cet appel irrésistible et c’est mérité ! Greeds prend la suite et c’est avec un set soigneusement très (trop ?) travaillé qui peine un peu à maintenir le souffle. Il faudra attendre les derniers moments pour que se pose et s’affirme une ligne musicale en accord avec les attentes festives et surtout le décompte horaire de la fermeture (23h). On attendait un peu la montée en puissance de la folie mais il faudra se contenter d’une roborative trépidation propice aux papotages mais où l’énergie se perd.

Le maître de la soirée, Vertuøze, entre en scène et on n’oublie pas qu’il a sur les épaules le stress et le poids de l’organisation de cette guinguette ( avec le soutien d’une équipe de bénévoles qu’il faut ici remercier et saluer ). Le diablotin qui ne fait pas que sommeiller en lui se réveille immédiatement et on retrouve par instant le prodigieux artiste qui depuis ses débuts nous étonne par sa virtuosité ( jeu de mots facile j’en conviens). Il semblait s’être parfois perdu dans une fuite en avant un peu « putassiere » en bpm, mais ce soir il nous montre une fois encore sa capacité à jongler et juguler des univers musicaux explosifs. Toujours sur sa crête, il flirte en permanence ( sans basculer) entre une ambiance Foire du trône qui serait tombée sous l’emprise de militants radicaux et une folie intérieure implacable qui impose sa vérité sans violence. C’est un peu le risque de côtoyer ainsi régulièrement les artistes de la scène locale, on en oublie parfois qu’avant d’être des « figures » locales ils sont avant tout des artistes et la nécessaire et évidente piqûre de rappel de ce closing nous le rappelle avec force.

Carton plein donc pour cette troisième guinguette version Senary, quelques bémols musicaux ne seront pas parvenus à entamer mon plaisir de me retrouver au milieu d’une foule heureuse et festive. Qu’on se le dise, cette guinguette est devenue l’incontournable événement de la rentrée et gageons que sa réussite est annonciatrice d’une saison musicale exceptionnelle. On peut, on doit toujours rêver !

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