Le site du journal La Liberté nous rapporte les propos, lors du conseil municipal de Caen du 19 mai dernier, d’une obscure conseillère municipale qui prépare certainement les prochaines élections. Selon Béatrice Hovnanian, la fête de la musique, à Caen, « la ville est abandonnée à ceux qui ont les plus grosses sonos… », ce sont là ses propos, rapportés en gros titre dans un article qui semble goûter le potentiel polémique de son papier. J’avoue ne pas avoir lu la suite ( payante), certain d’y trouver l’éternelle rengaine du « c’était tellement mieux avant… ». Depuis le 21 juin 1982, la fête de la musique, attribuée trop rapidement à Jack Lang, mais légitime fierté de son véritable créateur, Maurice Fleuret, a perdu sa naïveté originelle et partout en France, elle est devenue avant tout la fête à la saucisse, et l’occasion pour les grands collégiens ou les jeunes lycéens de se déniaiser un peu avec un bel alibi culturel.
À Caen, donc, le boom boom amplifié serait hégémonique et viendrait capter à son seul profit notre légitime désir de roucoulades flûtées ou de charmantes chorales.
Mais plutôt que d’être dans le constat amer ( et fortement teinté de nostalgie réactionnaire) n’est-on pas en droit d’attendre d’un homme ou d’une femme politique une réflexion plus large qui interrogerait de manière plus fine les raisons de cette dérive supposée ? Trop de bruit(s) donc et pas assez de musique, mais derrière cette accusation se cache à peine une autre, plus inquiétante encore : cette supposée nuisance sonore ne serait tout simplement pas de la musique ! Derrière ces accusations un peu rances, il faudrait peut-être se demander ( et peut-être s’honorer) pourquoi ces « sons » amplifiés monopolisent ainsi, le 21 juin, l’espace urbain. Une vitalité musicale donc, qui s’exprime après avoir été contenue ou interdite le reste de l’année ? Un « son » inaudible comme l’avait été le rock pour nos parents ? Un « mauvais goût » musical, sans raffinement ….
Voilà près de huit ans que je « chronique » chaque année la fête de la musique à Caen, et à chaque fois j’y évoque cette montée en puissance, cette réelle débauche de décibels mais pour aller au bout, il faudrait aussi rapporter les tentatives sérieuses de certains collectifs électro pour organiser un « quartier » dédié à cette culture musicale, comme cette vallée des jardins refusée par la mairie au dernier moment pour de compréhensibles mais tardives préoccupations sécuritaires. On attend de madame Hovnanian, et de nos édiles, un accompagnement et une prévision des problèmes et non pas cette simple dénonciation populiste. Faut-il une fois encore le redire ici, il y a à peine dix ans, la ville de Caen pouvait prétendre à une place essentielle sur la scène nationale des musiques électroniques. En 2025, par manque de lieux pérennes, ces expressions musicales se ruent simplement dans cette espace de liberté musicale qu’est la fête de la musique pour montrer qu’elles existent et (ou) survivent. Les artistes ne sont pas forcément des stratèges de la politique culturelle et ils se produisent là et où ils peuvent. Il appartient aux politiques locales d’accompagner et de nourrir toutes ces émergences créatives et de ne pas laisser s’installer ce far-west qui ne profite qu’aux plus forts ( et non pas aux plus sonores ) et aux plus commerciaux. Alors, oui, madame Hovnanian, vous avez raison, en tant que citoyenne, de commenter notre fête caennaise de la musique, mais dans l’opposition ou dans la future majorité municipale, nous serons en droit d’attendre de nos prochains élus autre chose qu’une vaine et stérile dénonciation.
Aux chiottes les djs !!
Comme une réponse potache et bienvenue aux propos précédents, d’étranges djs ont investi les toilettes du Trappist jeudi soir pour nous livrer une Toilets room. Le duo Injustice (sic), composé de Gaspard Augeron et de Xavier Deux Rognons ( re-sic) mixait en direct des gogues, des chiottes, bref un lieu de… merde, une manière plus politique qu’il n’y paraît de nous dire que ce sera peut-être, à l’avenir, le seul lieu electro-compatible à Caen…. C’était, assurément, un moment festif, attendons-nous donc à retrouver Injustice dans les plus belles toilettes de Caen.
Les jeunes générations ont des niveaux de dopamine lessivés par la surenchère de stimulations courtes.
Pas tous, mais beaucoup.
Je pense que ça joue sur la “méta” musicale du moment.
– Un jeune générant.