Ce matin, plus que jamais, je me rappelle que Cave Caenem n’est après tout rien d’autre qu’une tentative « littéraire » de journal intime. La question, le dilemme presque, est simple : rédiger (ou pas) un billet après les belles heures passées tandis que la ville fêtait une victoire sportive…

Au départ, un événement semi-privé, ou semi-publique : deux djs ( Vince Vega et Nico.B) qui, petit cadeau plein d’attention, viennent ambiancer la soirée-anniversaire d’un ami. Au final, un hymne à la musique, à l’amitié et surtout …à l’art du djing. 

Tout avait commencé la veille, aux trois marches qui accueillait une soirée Obsolete. Confortablement installés désormais dans la nouvelle implantation dansante du bar, les djs du  collectif déroulaient  avec finesse leur expertise du dancefloor tandis que Vince Vega me parlait de sa soirée de samedi, une soirée entre potes, au bar Bichette. À force de côtoyer ces oiseaux de la nuit musicale caennaise, la frontière entre la reconnaissance, le respect et l’amitié est de plus en plus mince, mettant parfois à dure épreuve non pas la sincérité de mon écoute mais sa bienveillante retranscription. En ce qui concerne mon dilemme d’hier soir, l’exercice s’avère encore plus difficile tant il s’agissait pour moi d’un événement privé, intime pour oser le mot, en réponse à l’invitation amicale de Vince. 

Trêve de fausse pudibonderie ou d’inutiles précautions oratoires, je me réveille ce matin avec l’envie de garder une trace de cette soirée, et n’est-ce pas là la seule raison d’être de ces billets ?

Ouvert depuis près d’un an au fond de la rue Arcisse de Chaumont, le bar Bichette, à bas bruit, mais non sans raison, s’est inscrit lentement dans le circuit « DJ friendly » caennais. Samedi soir, vers 21h, la salle du fond résonne de rires amicaux et complices, les platines sont installées mais c’est encore l’heure des cadeaux. Nico.B et Vince Vega attendent patiemment la bonne heure, tandis que dans la rue s’échappent les premiers cris de joie des aficionados du PSG. Tous les bars, ou presque, ont sorti les écrans télé mais, tel un petit village gaulois, le bar Bichette résiste à cette frénésie collective, encore plongé dans l’habituelle torpeur qui annonce le coup de feu de la fin de soirée. 

Vers 22h30, alors que la victoire semble acquise pour les Parisiens, Nico.B vient officier et ouvrir le bal. Plongé dans une douce nostalgie berlinoise, version 2010, un siècle pour la mémoire futile de certains, il installe un savant cocktail kicks-mélodies au parfum immédiatement enivrant. La pierre de Caen des murs du bar se prend un coup de jeune et de frais tandis que la lumière s’estompe. Et c’est parti pour cinq heures de ravissement. Profitant du sésame magique de la fermeture à trois heures du matin, je sais par avance qu’il faudra déguster  ce moment de répit, avant le rush de la fermeture des autres bars. Les feux d’artifice fusent rue Écuyère, les scooters tentent des wheelings dans la rue pour fêter la victoire, mais Vince Vega ne va pas quitter d’un iota sa ligne artistique en prenant la relève : nous entraîner, track après track, dans une dépendance de plus en plus urgente envers ses sonorités … irrésistibles. Entre les deux djs, et dans un cadre qui nous ferait presque croire qu’on serait comme à la maison, va se dérouler un dialogue complice et exubérant. À Vince Vega les échappées House qui feraient se trémousser de bonheur la bonne d’un vieux curé, à Nico.B les audaces techno-berlinoises qui feraient  onduler audacieusement un danseur bloqué sur RTL… c’est donc ça la magie d’un set réussi, l’alchimie de la maîtrise du dancefloor ? Complices comme jamais, les deux djs rivalisent de perles musicales et de scuds rythmiques jusqu’à parvenir à faire monter  littéralement un danseur au plafond, porté par l’énergie sportive d’amis ambiancés comme jamais. 

Une douce folie s’empare du bar, une folie heureuse et protectrice, bien loin des déchaînements que je lis ce matin dans la presse. Au bar Bichette, il y avait hier soir, comme une démonstration « live » du pouvoir de la musique. Les doigts magiques des djs avaient placé sur nos fronts le signe de l’harmonie. Le public plus hétérogène que jamais ne fait plus qu’un avec nos deux larrons, et pourtant, pour en connaître certains, je sais que cette musique n’est habituellement par leur « came ». Devant un tel petit miracle local, je ne pouvais pas me taire, même si tout cela est écrit à l’aune de la plus sincère des amitiés. On ne dit jamais assez aux amis qu’on les aime, puisse ce petit billet le redire ici en toute sincérité.

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