Hier soir débutait NDK ( deuxième du nom) ! Après une première édition, tout en tâtonnements, on attendait de voir se préciser une ligne éditoriale claire ( et assumée).
Lors du petit ( et très intime) cocktail d’inauguration, on pouvait encore craindre le pire en écoutant d’un quart d’oreille le déroulé fastidieux du président d’Arts attack ( l’association aux manettes de NDK) du parfait petit manuel de la langue de bois. Fort heureusement, il y a la “com” officielle (indigeste) et il y a les actes et le travail quotidien de celles et ceux qui ont œuvré à la réussite (prévisible) de ce NDK2.
Mille excuses par avance mais dans les lignes qui suivent je vais nécessairement “divulgâcher” quelques petites pépites, la première étant la parfaite utilisation du Cargö et de son espace. Si nous étions encore en petit comité hier soir, la circulation est enfin fluide avec les grandes portes d’entrée qui restent ouvertes et permettent de profiter pleinement de l’aménagement extérieur, des stands, des chaises, des tables, des arbres-lumière et cette petite scène extérieure qui fonctionnera dès ce soir avec ces miroirs-anamorphose qui risquent bien d’effrayer quelques clubbers ( ou de leur remettre les idées et les images en place !). Bref le Cargö se transforme réellement en un petit village autonome tout entier consacré à nos musiques et toute l’installation se prête merveilleusement bien à la flânerie, surtout avec cet été indien qui joue les prolongations. On est loin de la froideur de l’année dernière et on sent ( en actes ) une réelle réflexion qui gère au mieux les contraintes de l’espace.
Superpoze arriva ….et la musique s’en alla…
Souvenir d’un poème de Théodore de Banville : “Malherbe vint, et que la Poésie, En le voyant arriver, s’en alla.” qui m’assaille quand, vers 20h 30, débute le petit show du local de l’étape : Superpoze. Comme on aimerait se pâmer devant ses longues et prévisibles descentes et montées de gammes, devant cette impressionnante muraille de machines avec ces myriades de boutons, comme on voudrait avoir ce “shoot” de musique éthérée et aérienne et comme on reste …sur place. Un pianiste, côté jardin, balance ses arpèges échappées du cahier de notes d’un Sofiane Pamart en PLS, on n’entend que lui, ce qui est tout de même un comble avec l’instrumentarium électronique qui n’est plus qu’un décor, et côté cour, un batteur qui illustre avec tact ces petites roucoulades néo-romantiques. On dirait la bande-son d’un documentaire animalier avec, à la fin, le petit suricate qui se fait manger. La lumière met toute sa belle inventivité pour enrober le tout mais force est de constater que ça ne prend pas et que les envolées “ambiant” plombent la scène d’un ennui poli.
Direction le Klub pour Neue Grafik Ensemble, un ensemble à la tonalité free-jazz. Le leader du groupe, non sans avoir fait sa petite intro en mémoire à Adama Traoré, s’installe devant son clavier et on assiste ensuite à une imperturbable hybridation jazz-hip-hop-house qui ne manque pas de saveur mais tout de même avare en innovations.
C’est dans la grande salle que débute enfin (pour moi) la promesse de ce nouveau NDK avec le show très très efficace de Ouai Stéphane. Il faut dire qu’avec son set, c’est l’occasion de découvrir la somptueuse mise en espace de la scène ( spoiler alert !). Montés sur des châssis lumineux, des miroirs en rectangle pivotent sur eux-même et laissent apparaître tantôt la face-miroir tantôt un délicat froissage de papier blanc. L’infinie variation de cette proposition ( avec cette image de la salle qu’elle reflète de temps en temps, et ces interstices qui dévoilent la cage de scène) élimine tout risque d’ennui ou de lassitude tant ce dispositif est une machine de jeu scènique. Si l’on ajoute à cela un immense lustre-pieuvre qui surplombe la salle, on obtient un habillage digne d’un …véritable festival ….
Ouai Stéphane, qui apporte avec lui toute la folie généreuse et diabolique de ses constructions musicales, Ouai Stéphane et sa science certaine de la citation musicale ( des petits bouts de “tubes”, jusqu’à ce “tous ensemble, tous ensemble…” qui sent bon la chaleur des vestiaires) , Ouai Stéphane et son jeu minimal avec une horloge de chantier qu’il maltraite à vue, comme pour remonter le temps ( et la musique), Ouai Stéphane et son étendard à linge qui se transforme en machine à scratcher …. Voici ce qu’on attend d’un festival : des découvertes, des émotions, de la joie et de la surprise et Ouai Stéphane avait tout cela dans sa hotte de père Noël numérique, et derrière cela, il y avait cette intelligence musicale, cette maîtrise du rythme et du beat… à mes yeux le carton-plein de la soirée, et avec humour et dérision en plus, des valeurs qui sont de moins en moins portées par une scène électro qui se pique de sérieux et de reconnaissance.
Le sérieux ( austère) on le retrouve sur la scène de Klub avec Goldie B, une jeune femme qui amorce une lente et sensuelle montée vers l’énergie drum-bass qu’apportera Saku Sahara, la première arrivée de cette déferlante lyonnaise dans la programmation de NDK. L’ambiance est très joyeuse et le petit village s’anime d’une belle insouciance festive, dernier détour vers la grande scène ou Mezigue ( en B2B avec Mad Rey) balance toute son énergie vorace et visiblement communicative même si ce n’est pas ma “tasse de thé”, mais n’est-ce pas là la dynamique propre à ce genre de manifestation : en offrir pour tous les goûts.
Ce soir, j’ai la chance d’assister à la création de ma nouvelle pièce à Paris, pas de NDK pour moi donc et quel plus beau gage de sympathie que de dire que je le regrette un peu tant la dynamique installée hier-soir semble prometteuse. Je me rattraperai samedi avec, je l’espère, plein de Ouai Stéphane à découvrir.
Pour le reste, inutile de nous rebattre les oreilles avec une communication toujours aussi hésitante qui se glorifie d’un festival à “taille humaine”. Un festival à taille humaine, en bon français, cela s’appelle une fête et par les temps qui courent, une fête réussie c’est un cadeau ! Merci aux petites mains et aux hommes et femmes de l’ombre de ce NDK pour cette belle promesse devenue réalité et gageons qu’à l’intérieur de vos murs vous trouverez des mots plus justes, plus musicaux, plus modestes et plus inspirés pour parler ( et crier amoureusement) cette fête au village electro…..