Les bonnes nouvelles du printemps…
A force de vivre des lundis qui ressemblent à des samedis, qui, eux-mêmes ont le goût déprimant d’une Toussaint infinie, on en venait presque à croire que nous ne sortirions jamais de cette grisaille ….
Et voici pourtant que le printemps nous livre enfin ( en dépit de sa morose vigueur) son lot de petits espoirs.
Les terrasses, certes….Mais elles seront prises d’assaut. Les magasins, why not… Ce n’est donc pas du côté des initiatives nationales que je vois deux ou trois petits messages d’espoir mais bien plus dans quelques initiatives locales qui nous prouvent que ça …respire encore.
Une nouvelle direction du côté du Cargö….
Dernière semaine d’avril, les médias locaux nous annonçaient l’arrivée prochaine d’un nouveau directeur au Cargö, certains gros-titres osaient même un “enfin” qui en dit long sur cette période de vacance qu’aura connue ce lieu. Jérémie Desmet donc, à qui reviendra l’énorme responsabilité de reprendre en main ce Cargö soumis à de rudes tempêtes depuis quelques temps. Au moment même où cette annonce tombait, j’avais la chance d’être en résidence de création dans cette même maison, pour une grosse étape de création du projet Uhme ( Une Histoire des Musiques Electroniques ). Le devoir de réserve que m’impose naturellement ce statut ne m’empêche en rien de souligner ici les enjeux et les attentes autour des salles de musiques actuelles (Smac). Créées à la fin des années 90, ces salles répondaient alors à des besoins cruciaux de visibilité pour certaines expressions musicales (non-académiques, pour faire court). Depuis, ces “maisons” ce sont bien implantées dans le paysage national, mais, revers de la médaille, elles se sont un peu “embourgeoisées” et peinent parfois à rendre lisible et compréhensible leur politique culturelle. Gageons qu’avec l’arrivée de ce nouveau directeur, le Cargö se retrouvera à la pointe d’une réflexion nécessaire si les Smac entendent poursuivre une mission d’éclairage et d’accompagnement des musiques ….actuelles !
Il se murmure, ça et là, une réaffirmation forte de la couleur “electro” du Cargö, et mieux encore, tel un Phénix plus caennais que jamais, un festival electro en pleine renaissance, Cave Caenem s’en pourlèche les babines d’avance….
Patrimoine et musiques actuelles : le bon mariage normand ?
Autre bol d’air, la découverte de Out Fest. De quoi s’agit-il ? L’initiative locale de deux figures culturelles locales, Adrien Hoareau et Maxime Parfait repose sur un pari simple : faire dialoguer le patrimoine local avec les artistes de la scène musicale régionale. L’instrument privilégié et exclusif de ce dialogue est la video et voilà qu’on se retrouve déjà avec deux lieux : la roseraie de la colline aux oiseaux et la terrasse panoramique du Dôme. Deux “clips” en exterieur donc avec un gros travail de montage ( mention spéciale pour le drone survolant le Dôme, samedi soir, lors du clip consacré à Zélie). On s’éloigne définitivement des captations-live qui ont fait le succès ( et les limites) des premières heures du confinement et on se retrouve avec un “produit” léché à l’extrême, sans qu’il soit toujours possible de distinguer qui met en valeur quoi. Est-ce l’artiste qui est “sublimé” par le cadre patrimonial, ou l’inverse. C’est dans les prochaines livraisons d’ Out Fest qu’on aura des réponses plus précises autour de ces questions, qui ne sont peut-être que de vaines interrogations esthétiques là où domine avant tout une volonté généreuse ( et enthousiasmante) de proposer un éclairage de qualité.
Le choix des futurs lieux de tournage sera déterminant, tant dans le dialogue poétique qu’il devra installer avec les musiques proposées que dans l’originalité même de cette notion du patrimoine local. En tout cas l’initiative des deux compères prouve, s’il en était besoin, que la crise sanitaire aura été, pour certains, une fantastique contrainte créatrice, illustrant une nouvelle fois la phrase (parfois galvaudée) d’André Gide : “L’art naît de contraintes, vit de luttes et meurt de liberté.”.
Et le réveil “culturel” caennais ?
Il est encore un peu tôt pour commenter ( et apprécier) les propositions de sortie de cette veille léthargique que vient de subir le monde culturel caennais, mais des signes de frémissement sont gages d’espoir, Interstice qui développe une semaine “professionnelle” avant d’étaler une programmation jusqu’à la fin de l’année, la Comédie de Caen qui, passant outre la trop sclérosante accalmie des vacances scolaires, programmera des spectacles en juillet et le Théâtre de Caen qui relance son cycle sur les quatuors de Haydn…. Tradition (s), audace(s), modernité (s), lequel de ces termes sortira victorieux de cette crise, chacun aura bien sa petite idée mais espérons que nous saurons tous tirer les conséquences pragmatiques et nécessaires de cette épreuve qui nous aura, peut-être, rendu plus modestes mais aussi plus solidaires….