Le billet que j’aimerais écrire….un jour.

Si, comme le disait Lamartine, “un seul être vous manque et tout est dépeuplé” que dire alors du manque réel de ces soirées durant lesquelles la musique nous réunit ?

Alors, pour ne pas céder à une terne morosité bien égoïste devant le combat que poursuivent actuellement celles et ceux qui sont “au front” pour nous servir, ou pire, nous sauver, je me plais à rêver d’une somptueuse soirée d’armistice, puisqu’il paraît que seul le vocabulaire guerrier est encore de rigueur pour parler de satané virus. 

Une sacrée putain de soirée d’armistice donc.

Evidemment nous serons tous encore “groggy”, encore étourdis par ces coups du sort, et cette crainte qui aura patiemment fait son travail de défiance et de peur. Mais on serait tous là, qui sait sur cette immense prairie, qui n’est belle que les soirs du 14 juillet ! Un immense espace donc et au loin, masquant  (un peu) le parc des expositions, une scène timide, inutile de rêver en grand, comme avant, ça le corona nous l’aura bien fait comprendre. Une scène faite de bric et de broc, amplifiée à la va-comme-je-te-pousse, un collectif par ci qui file ses platines, un collectif par là qui file ses amplis, ses enceintes, son coeur et que sais-je encore. Pour un soir, juste un soir d’armistice, on laisserait de côté les autorisations préfectorales, les nuisances sonores, les décomptes macabres ou administratifs, 100, 1000, au diable les chiffres !

On s’embrasserait encore de loin, et si ce mètre devient la norme, je suis prêt à sortir avec le plus ridicule des vertugadins, vous savez cette armature grotesque portée par les nobles Espagnoles au XVIème siècle, j’ai des jours de confinement pour m’amuser avec mes ciseaux. On aurait ainsi une drôle de touche, avec nos cerceaux en guise d’armure et d’amour mais on serait dehors, à s’enivrer d’être en vie, de se voir, de se parler en “live”, de se sourire sans la latence de skype, et de danser.

Aux platines, ça défilerait dans une joyeuse pagaille, Darkvibe et ses tonitruantes trépidations rythmiques, Ethereal Structure et son élégante précision, Polar X et ses incursions berbères, Zélie en fantomette de la dark, Lisa Lisa, plus glamour que jamais dans ses choix house, Fred H en gardien et précurseur des tendances, Bruderschaft dans sa sombre rêverie electro, Aerobrasil et son ticket-gagnant pour un voyage musical, Angseth pour nous rappeler à la sensuelle rigueur de la techno, et tous les autres, dans la foule, l’homme au chapeau rose, Morgane et sa petite mine à la Audrey Hepburn, Jonathan, en lutin “triphasé”, Léa sans laquelle une soirée electro reste impensable, Jean-Claude et ses analyses musicales aussi fines que sans appel, Elbe, sortie tout droit du Labyrinthe de Pan, et retour aux artistes, Totem, plus délicat que jamais, NJ Nj en déesse de la trance….

Une putain de soirée d’armistice où, même sans avoir à le dire, à l’écrire, à le crier, on sentirait cette belle vibration de vie qui nous animerait, ce plaisir de se dire qu’on s’aime, qu’on a besoin des uns et des autres, et que la musique n’est jamais aussi belle que quand elle se partage. 

A la tombée de la nuit, sur la prairie, on verrait des enfants danser et courir, des chiens errer, des petits vieux et des petites vieilles fascinés et étonnés par cette débauche d’amour et de vie et qui sait, Ottobass en profiterait pour nous passer quelques pistes d’autrefois, moulinées à sa sauce….Peut-être même qu’on pourrait se réchauffer devant une immense effigie en bois du corona, symboliquement brûlée à jamais …Ce serait une fête païenne, une fête citoyenne, une fête improvisée dans l’urgence (ce sont toujours les plus belles, non ?), une fête gratuite et folle, comme un immense pied de nez final à toute cette “merde” que nous vivons….

Comme je l’attends, comme je l’espère, cette soirée d’armistice, mais je vous connais, mes ami(es) de la nuit, et je sais qu’avec vous la réalité dépassera toujours ma fiction, même si c’est un rêve….

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