La dernière édition de la Saint Love, c’était il y a plus de deux ans, quelques semaines avant le premier confinement, autant dire il y a des siècles. C’est dire combien j’attendais cette reprise, histoire de voir si la flamme Mad Brain brûle encore quand elle illumine les nuits de Saint-Lô, une préfecture « pantouflarde » qui, toute l’année esquive un peu les radars de nos nuits electro. 

Programmée sur deux jours ( si vous n’avez rien prévu ce soir, vous savez ce qu’il vous reste à faire) LA Saint-Love, une manifestation qui  mérite bien son article en majuscules, a pensé sa première soirée « warm-up » en concentrant toute son énergie sur un focus artistique régional : Sprns, Weiser, Ethereal Structure et Infracid. Cette volonté de mettre en avant les forces créatives locales, déjà clairement revendiquée lors d’une grosse soirée Cargö, retrouve une fois encore sa pertinence vendredi soir. En donnant à chacun de ces artistes deux heures pleines pour s’exprimer musicalement, l’association conforte ses engagements en matière de politique artistique et offre ainsi un écrin essentiel ( et trop rare) pour l’épanouissement d’un discours « electro » qualitatif et professionnel.

La salle retrouve sa scénographie initiale ( après une tentative assez peu convaincante de placer les djs au centre) et on retrouve donc une scène en fond avec dix tubes néon-leds ( ça soit certainement avoir un nom technique plus précis ) de part et d’autre de l’artiste. Un très beau et rigoureux travail de lumière permet à ces tubes, aidés par deux lasers, de donner comme une sorte d’aura lumineuse aux artistes qui profitent chacun d’une ambiance de teintes ( du blanc au rouge, en passant par le bleu…) et plus encore de subtiles variations du ruban lumineux qui tantôt devient menu déroulant ( Mad brain en mode Times square) ou nuage diapré de lucioles furtives. C’est beau, dynamique et jamais lassant. Si on ajoute en plus que la lumière dialogue habilement avec les attaques des kicks on obtient un dancefloor qui n’a pas à rougir de la comparaison avec de grosses maisons bien plus richement dotées.

En warm up, SPRNS ouvre le bal, et comme je suis totalement sous le charme de ce petit elfe bouillonnant depuis mon travail avec elle sur uHME, je suis évidemment de parti pris. Elle attaque fort, la « bougresse » avec des bpm qui flirtent allègrement avec les 140. Avec elle, pas le temps d’offrir à nos oreilles un passage par le pédiluve, on plonge immédiatement dans le grand bain techno. Il faut bien dire qu’elle aurait bien tort de se priver, la salle est encore presque vide, vers 22h30 et elle serait bien idiote de ne pas se faire plaisir et de profiter ainsi de la belle installation « son ». Le set est à son image, généreux et parfois déroutant, avec des chevaux de course old School qu’elle assagit avec de lentes digressions funky. 

Weiser ( l’alter ego de Bruderschaaft) prend la suite et s’il se cale superbement  dans la dynamique déjà survitaminée de SPRNS, il le fait avec une volonté quasi hypnotique de nous séduire par son approche sinueuse de la techno. Avec lui,on se retrouve vite au piège d’un dancefloor qui, tel des sables mouvants, vous emporte, presque malgré vous dans les filets retors de son art. Presque pas de transitions ou de ruptures mais une lente et irrésistible progression chromatique, on en oublierait presque la (haute) tenue des bpm pour se lover dans accolades mélodiques langoureuses qu’il glisse avec maestria. Un travail de (très) haute précision qui ne fait que confirmer la place essentielle de Weiser dans le paysage musical régional.

Le Big boss de la soirée ( par ailleurs grand vizir chez Mad brain) Ethereal Structure entre en scène et vient rompre, sciemment,  les effluves (pourtant éthérés ) de Weiser. Avec lui, place au retour triomphal de la pure énergie et cette rupture est la bienvenue tant elle place la dynamique de la soirée dans une nouvelle perspective rythmique. En mode « energy drink » il rebooste un public déjà soigneusement sollicité par Weiser et ça repart de plus belle. Malheureusement pour moi, je vois bien que la pause de deux ans de Covid est passée par là et je sens mon âge. Peut être que la présence d’un petit coin Chill avec une ou deux chaises m’aurait permis de retrouver mes forces, mais en l’absence de toute consommation illicite, force est de constater qu’il le faudra encore quelques soirées de « mise en jambes » avant d’espérer finir à six heures du matin. Hélas donc je ne profiterai pas du final d’Infracid mais qui sait, lors de la prochaine Saint Love il y aura un petit coin techno-Ehpad ?

Ce soir, l’affiche de la deuxième soirée Saint Love s’annonce, elle encore, prometteuse, Glass en tête  ( et en live !) et le retour d’Ekzon. Si, pour diverses raisons, ces deux noms ne vous disent rien, c’est un argument ultime pour vous rendre à Saint- Lô ! 

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